Ruja Ignatova, la femme la plus recherchée du monde par le FBI

Qui est vraiment la Cryptoqueen Ruja Ignatova ?

Nous ne savons que très peu de choses de l’enfance de Ruja Ignatova, si ce n’est qu’elle est née en Bulgarie en 1980 et qu’elle a émigré en Allemagne à l’âge de 10 ans avec ses parents. Mais sa carrière a été marquée par des activités qui allaient au-delà des affaires traditionnelles, flirtant avec des éléments de cyber-attaques et de fraudes à grande échelle.

Si l’on passe cette enfance secrète, le reste de son CV est des plus impressionnants. Elle passe par Oxford avant d’obtenir un doctorat en droit privé international à l’université de Constance en Allemagne.

Ses diplômes en poche, Ruja Ignatova passe par la branche bulgare de la société de conseil McKinsey, dont elle devient la plus jeune partenaire associée du pays. Polyglotte et intelligente, elle impressionne tous les banquiers et hommes d’affaires qu’elle rencontre. Mais lorsque McKinsey ferme ses bureaux en Bulgarie, elle se retrouve sur le banc de touche. C'est à ce moment que sa carrière prend un tournant inattendu, explorant des activités qui la mèneront à être impliquée dans ce qui pourrait être qualifié de cyber-attaque à grande échelle.

Quelles ont été les premières arnaques de Ruja Ignatova ?

Depuis toute petite, celle qui deviendra bientôt la Cryptoqueen rêve de richesse. Pleine de ressources, elle se donne les moyens pour réussir, même si cela implique de sombrer dans l’illégalité.

C’est ainsi qu’en 2010, elle rachète une fonderie en faillite avec son père. À peine deux ans plus tard, ils la revendent. Problème : l’entreprise est à nouveau en faillite quatre jours plus tard. Une enquête est alors menée et condamne Ruja Ignatova à 14 mois de prison avec sursis. Mais bien loin d’être refroidie par cette condamnation, la Cryptoqueen n’en a pas fini avec les arnaques.

En 2013, elle se lance dans la finance et rejoint la société BigCoin qui a monté une crypto arnaque reposant sur une pyramide de Ponzi. L’escroquerie est rapidement révélée au grand jour sans pour autant que Ruja ne soit inquiétée dans l’affaire. Elle se servira même de cette expérience chez BigCoin pour créer sa propre cryptomonnaie : le OneCoin.

Quelles étapes ont mené Ruja Ignatova au sommet de la cryptomonnaie ?

Comment Ruja Ignatova a-t-elle lancé OneCoin ?

Nous sommes en 2014, les cryptomonnaies commencent à gagner en popularité grâce à la médiatisation des premières fortunes qu’elles ont permis de bâtir. La plus célèbre d’entre elles : le Bitcoin. Mais elles restent un produit confidentiel et complexe à appréhender.

Avec deux associés (son frère, Konstantin Ignatov, et Sebastian Greenwood, lui aussi passé par l’arnaque Big Coin), Ruja Ignatova décide alors de fonder OneCoin. Pour convaincre les investisseurs, des avantages alléchants sont avancés :

• Gain de temps
• Sécurité
• Facilité d’utilisation
• Facilité d’achat
• Rendements très intéressants

Mais l’argument qui convainc le plus est l’accessibilité du OneCoin. Là où les cryptodevises déjà en circulations sont plutôt réservées aux initiés, le OneCoin constitue une véritable révolution financière qui vise à changer la vie du plus grand nombre. Près de trois millions d’investisseurs néophytes se laissent alors convaincre et achètent des OneCoin. Et c’est justement parce que ces investisseurs manquent de connaissances en finance et en cryptomonnaies que cette arnaque a pu être couronnée de succès. Ce manque de vigilance souligne l'importance de la cybersécurité dans la protection contre de telles fraudes.

Pourquoi OneCoin a-t-il suscité l’engouement de plus de 3 millions d’utilisateurs ?

Entre 2014 et 2016, la Cryptoqueen et ses associés récoltent plus de 2 milliards de dollars à travers le monde. Mais qu’est-ce qu’il a permis cet engouement planétaire ?

La pierre angulaire de la stratégie OneCoin reposait sur la figure de Ruja, autour de qui s'établit un véritable culte de la personnalité. Pour plus de légitimité, elle a commencé par se faire appeler « Dr Ruja Ignatova ». Elle s’offre ensuite la une de Forbes Bulgarie pour mettre en avant sa success story. Enfin, elle mise énormément sur son image, n’hésitant pas à recourir à la chirurgie esthétique et à se parer de robes haute couture et de diamants. Le pari est simple : pour gagner la confiance de nouveaux investisseurs, son apparence doit refléter la richesse.

Mais Ruja n’est pas la seule à bénéficier de ce culte de la personnalité. Pour trouver de nouveaux acheteurs, OneCoin organise des conférences à travers le monde, auxquelles elle et ses deux associés sont accueillis comme des rockstars, ou plutôt comme des gourous. Plutôt que les arguments mis en avant, c’est surtout l’aura des dirigeants qui incite les nouveaux acheteurs à investir.

Lors de ces conférences, les meilleurs investisseurs sont invités à parler en public. Transformés en véritables ambassadeurs de l’entreprise, leurs succès achèvent en général de convaincre les plus récalcitrants.

Mais il n’y avait pas qu’eux qui deviennent ambassadeurs du OneCoin. De fait, le système d’acquisition de l’entreprise reposant en grande partie sur du MLM, aussi appelé marketing multi-niveaux, un bouche à oreille sans précédent s’est mis en place. Grâce à un système de commissions, les détenteurs de OneCoin sont incités à parler de cette cryptomonnaie à leurs proches ; ils investissent ensuite à leur tour, se disant que si leurs amis ou familles avaient pu s’enrichir de cette manière, eux le pourraient aussi.

Comment le système OneCoin arnaquait-il ses utilisateurs ?

Qu'est-ce que la pyramide de Ponzi en cryptomonnaie ?

Une pyramide de Ponzi est une escroquerie financière qui consiste à rémunérer les premiers entrants avec les fonds amenés par de nouveaux investisseurs. Pour attirer les plus crédules, ce système promet des rendements mirobolants qu’il est impossible d’obtenir ailleurs. En théorie, ces rendements peuvent en effet être atteints, mais uniquement :

• Sur une courte période
• Si vous faites partie des premiers investisseurs, ceux qui appartiennent aux rangs les plus élevés de la pyramide, à sa pointe

À plus long terme, il devient de plus en plus compliqué de trouver de nouveaux investisseurs, ce qui finit par provoquer l’effondrement de la pyramide sans que les derniers rangs d’investisseurs n’aient pu toucher la moindre rémunération. Ce type de cyberattaque, sous forme de pyramide de Ponzi numérique, exploite les faiblesses humaines autant que les failles technologiques.

Comment fonctionnait l’arnaque de la Cryptoqueen ?

Nombreuses sont les promesses du OneCoin, et parmi elles, celle de multiplier son argent rapidement et sans risque. Pour preuve : la courbe de valeur disponible sur le site de l’entreprise ne cesse d’augmenter. Le OneCoin est ainsi passé d’une valeur de 50 centimes à son lancement à 29,95 euros à son apogée !

Ceux qui souhaitent investir pour profiter de ces rendements impressionnants doivent alors choisir un package, dont le prix varie de 110 000 à 118 000 euros.

Mais les connaisseurs finissent par flairer l’arnaque, et pour cause : la courbe fièrement présentée par OneCoin est uniquement croissante. Pas une baisse, pas un décrochage, ce qui est presque impossible pour un produit financier. Et pour cause : le OneCoin n’est pas un produit financier. S’il a toujours été présenté comme une véritable cryptomonnaie, en réalité, il n’en est rien car aucune technologie de blockchain ne sous-tend sa valeur.

La courbe disponible sur le site de l’entreprise est en réalité manipulée de toutes pièces par les équipes de la Cryptoqueen, qui décident en temps réel de la valeur à afficher.

Ceux qui se rendent comptent de l’arnaque OneCoin n’ont alors qu’une seule solution pour limiter les dégâts : parrainer de nouveaux entrants pour toucher à chaque fois une commission de 10 %. S'ensuit alors un cercle vicieux qui ne s’arrête qu’une fois qu’il devient impossible de trouver de nouveaux investisseurs, car tous sont déjà tombés dans le piège.

Quelles ont été les conséquences de la cyber-arnaque de Ruja Ignatova ?

Quelles actions ont permis de démasquer l'escroquerie de Ruja Ignatova ?

Pour avoir la moindre valeur, une cryptomonnaie doit utiliser la technologie blockchain. Or, cette technologie est transparente : il est possible de retrouver les enregistrements des transactions impliquant la cryptomonnaie à laquelle elle est liée. Le problème, c’est que pour le OneCoin, on ne trouve rien.

En 2016, un ingénieur en blockchain lance l’alerte. En répondant à une offre en ligne, il a pu accéder au backend de l’entreprise et confirmer les doutes de nombreux experts en cryptomonnaies : le OneCoin n’utilise aucune blockchain, ce n’est donc nullement une cryptodevise, seulement un montage frauduleux s’appuyant sur une arnaque pyramidale. La vérité concernant l’actualisation manuelle de la courbe est également dévoilée.

Suite à ces révélations, de nombreux investisseurs essaient de revendre leurs OneCoins, mais ils ne valent rien. Les experts en cybersécurité qui ont enquêté sur cette affaire ont confirmé l'absence de toute technologie blockchain véritable. Les plaintes se multiplient dans 25 pays. Des enquêtes sont lancées, en Italie d’abord. L’Allemagne suit, et interdit même la commercialisation du OneCoin en 2017. Mais les investigations traînent. Personne ne sait réellement où se situe le siège de l’entreprise, et il est difficile de retrouver les dirigeants pour leur poser des questions. Ces derniers ont d’ailleurs tout le temps de préparer leur porte de sortie.

Quelles ont été les circonstances de la disparition de Ruja Ignatova ?

Acculés par la multiplication des enquêtes dans les pays touchés, les dirigeants de OneCoin voient leurs possibilités de déplacement drastiquement restreintes. Ils savent qu’ils doivent être en mesure de disparaître du jour au lendemain s’ils ne veulent pas avoir à répondre de leurs actes. Et c’est justement ce qu’a choisi de faire Ruja Ignatova.

Le 25 octobre 2017, elle décolle de Sofia, en Bulgarie, en direction d’Athènes, où elle disparaît sans laisser de traces. Elle est depuis en cavale.

Après sa disparition, son frère prend sa place à la tête de OneCoin. L’entreprise continue à tourner pendant trois ans, avant que Konstantin ne soit arrêté par la police américaine en 2019. Un an avant, c’était leur autre associé, Karl Greenwood, qui subissait le même sort.

Konstantin Ignatov plaide coupable, et après avoir passé 34 mois en prison, il a été libéré en mars 2024. Karl Sebastian Greenwood a lui écopé d’une peine de 20 ans de prison et de 300 millions de dollars d’amende.

À combien s’élève l’arnaque de la Cryptoqueen ?

L'arnaque de la Cryptoqueen et de ses associés a permis d’engranger plus de 4 milliards de dollars de revenus, dont 2,7 milliards de profit. Au total, on dénombre près de 3,5 millions de victimes.

Conclusion : où est Ruja Ignatova aujourd'hui ?

Aujourd’hui, Ruja Ignatova est toujours en cavale. Plusieurs théories existent quant à l’endroit où elle se cacherait :

• Elle pourrait être non pas sur la terre, mais en mer à naviguer entre les îles grecques grâce à son méga yacht. Après tout, quoi de mieux pour échapper aux autorités que de rester dans les eaux internationales ?
• Elle pourrait se cacher sous une fausse identité et avec un nouveau visage, et profiter de ses milliards engrangés à Dubaï, en Russie, ou dans un autre pays.
• Elle serait morte depuis 2017, tuée par Taki, un trafiquant de drogue bulgare qui était chargé de sa sécurité et qui aurait voulu se débarrasser d’elle lorsqu’elle devenait encombrante. Des messages vocaux retrouvés sur l’ordinateur d’un policier bulgare corroborent cette hypothèse, cependant le doute subsiste : la Cryptoqueen n’aurait-elle pas elle-même essayé de simuler sa mort pour que les forces de l’ordre relâchent leur traque ?

Le doute subsiste, assez pour que le FBI la laisse sur la liste des 10 personnes les plus recherchées au monde, et promette une récompense de 5 millions de dollars en échange d'informations la concernant.

De son côté, le lanceur d’alerte qui a permis de démasquer l’arnaque vit encore aujourd’hui sous protection policière.

L’affaire Ruja Ignatova n’est pas la seule à avoir ébranlé le monde. Découvrez-en plus sur 15 autres cybercriminels qui ont marqué l’histoire !

Questions fréquentes à propos de Ruja Ignatova 

À combien s'élève la fortune de la Cryptoqueen ?

La Cryptoqueen ne posséderait pas moins de 230 000 bitcoins, ce qui au 9 août 2024 correspond à plus de 12 milliards de d’euros.

Quelle récompense le FBI offre-t-il pour trouver Ruja Ignatova ?

À l’heure actuelle, le FBI offre la coquette somme de 5 millions de dollars à toute personne qui offrirait des informations permettant son arrestation. Cette récompense a été revue à la hausse le 26 juin 2024 ; elle était auparavant de 100 000 dollars jusqu’à mars 2024, puis de 250 000 dollars.